Flirt (pv Camille)

C’est un verre d’alcool à la main, assise sur une des nombreuses tables rondes du cabaret, que Camille observe avec admiration le spectacle donné par sa soeur. La soirée s’annonçait plutôt agréable, pour le moment, à siroter lentement le seul verre que la blonde comptait prendre. Agréable, quand elle sait qu’elle ne montera pas sur la piste aujourd’hui, et qu’elle peut passer incognito, tant qu’elle ne rencontre aucune de ses “connaissances” du cabaret.

Ca lui fait tant de bien, de pouvoir voir le bonheur sur le visage de Valentine quand elle montre ses talents, et pourtant elle l’envie. De croire à tout ça, de croire que la magie peut donner le sourire aux gens, qu’un coup de baguette magique soit capable de tout. Si le bonheur pouvait véritablement venir aussi facilement, surement que Camille se serait jeté sur une telle recette. Et pourtant, elle se prend à applaudir à chaque tours, sans même s’y forcer. Décidément, sa soeur était capable de réveiller tant de choses en elle.

Mais cela ne dure pas, quand une de ses collègue approche, qu’elle voit son regard à la fois rempli de jalousie et de mépris. La blonde hausse un sourcil, ne dit rien et hésite un moment à faire comme si elle n’était pas là, mais elle prend la parole.

« Le patron te demande. »

Rapidement, Camille comprend. Les motivations du patron en question, elle a tellement l’habitude de ses demandes en privé, et de ce qui semble motivé le ressentiment de celle face à elle. Alors elle ricane.

« Oh, désolé ma pauvre. Peut être que demain c’est de toi qu’il voudra. »

Elle vide son verre cul sec avant de se lever, contourne l’autre et fait un signe rapide à sa soeur sur scène en lui adressant un sourire avant de rejoindre Cyriaque, ne lui lâche qu’un regard froid en avançant. Elle n’a pas besoin de mots pour savoir où ils iront, tous les deux.

Elle qui croyait passer une soirée ordinaire, pour une fois.

Au lieu de ça, c’est le dégoût qui prend place quand elle se retrouve seule avec lui, les faux semblants quand elle simule le plaisir. Le mépris, l’écoeurement. Elle regrette d’avoir espérer, pour une fois.

« Tu féliciteras pour moi ta chère soeur sur sa prestation, en fait. »

Lui, qui part, la laisse seule après avoir posé un billet. Il la laisse seule, dans son dégoût. Et il lui faut un moment, avant de cesser ses tremblements, avant que l’envie de vomir se dissipe. La pensée de Valentine, qui doit avoir fini son spectacle depuis un moment déjà, qui doit l’attendre sans aucun doute, la calme difficilement. Camille se rhabille, remonte le pas pressé, le regard assombri jusqu’à ce qu’elle revienne à la foule. Elle reprend un sourire, quand elle se met à la recherche de sa cadette.

Mais une fois qu’elle y parvient, il lui faut quelques secondes pour réaliser l’homme assit face à elle, son regard sur Valentine. Il faut une seconde à peine, pour que Camille se sent pâlir, imagine le pire scénario, sur la façon qu’il pourrait la voir. Alors elle avance, rapidement, se met devant le mec, le regard sombre.

« Dégage, tout de suite.
- ... Je vous demande pardon ? Je ne vous connais pas, laissez-moi parlez…
- JE T’AI DIS DEGAGE ! »

C’est quand elle réalise le regard des gens autour d’eux que Camille reprend ses esprits, lutte contre la colère qui bouillonne et attrape le poignet de Valentine, la force à avancer pour l’emmener dehors. Une fois à l’extérieur, desserrer sa prise sans la lâcher complètement, sent sa main trembler quelques secondes, avant qu’elle ne réussisse à se calmer complètement.

« …. Désolé, Valentine, pour cette scène. Mais ça se voyait que cet homme n’a rien de respectable. »

Rien, quand dans son regard Camille a cru voir cette lueur malsaine quand il posait les yeux sur sa soeur. Rien, quand elle sait les pourritures traînant au cabaret. Rien, quand la pire des pourritures venait de la salir un peu plus cette nuit-là.

Camille ne parvient pas à faire taire la colère bouillonnant en elle, à cause de ce garçon, à cause de son manque de vigilance alors qu’elle était à la merci de Cyriaque, et à cause de ce dernier. Valentine, c’était pas la fautive dans l’histoire, juste celle qu’il fallait éloigner au plus vite du danger sans doute imaginaire, mais bien trop probable au yeux de la blonde pour ne pas prendre de risque. Si elle savait, Valentine, comme cet endroit lui faisait peur, pour elle.

« Mais mais… on discutait simplement, je ne vois pas ce qu’il n’y avait pas de respectable…Et même s’il avait de mauvaises intentions, qui te dit que je n’en avais pas envie aussi ? »

Non.
Non.
Tu comprends pas, Valentine.

Camille écarquille les yeux, se sent reculer d’un coup. Et brusquement, c’est à sa soeur qu’elle en veut, serre les poings sans réellement s’en rendre compte.

« Cesse d’être aussi naïve, tu comprends rien à rien ! »

Et immédiatement elle regrette, mais Valentine l’a poussé à de tel propos, à la faire craquer l’espace d’une seconde, avant de détourner le regard, murmurer d’une voix faible.

« Désolé, je ne voulais pas crier, et encore moins dire ça… C’est juste… Je veux juste que tu te méfies des gens d’ici. »

Parce que tout le monde n’est pas aussi gentil dans ce monde, mais c’est sur dure pour Camille, de devoir lui faire affronter ça. Tout serait mieux, si elle pouvait lui mettre des ouillères sur les yeux indéfiniment pour que sa chère soeur puisse continuer à rêver. Elle finit par oser la regarder de plus belle, un léger sourire sur le visage, et de la lâcher enfin. Ceci dit, elle la fixa dans les yeux, un brin autoritaire malgré la douceur.

« Je comprend le plaisir que tu as à parler aux autres, à te faire des amis… Mais je n’ai pas envie qu’il t’arrive quoi qu’il se soit, alors sois prudente. Promet-moi le, d’accord ? »

Il le faut, pour que Camille soit rassurée, qu’elle puisse donner un minimum confiance en sa soeur quand elle n’est pas là.

Valentine pleure. Qu’est ce qu’elle peut se haïr, Camille, d’un seul coup. Elle ne parvient plus à dire quoi que ce soit, aimerait pourtant s’excuser une nouvelle fois et trouver quelque chose à dire en plus pour essayer de la calmer. Pourquoi a t-il fallu qu’elle s'énerve, surtout contre la personne qu’elle souhaite le moins blesser ? Pourquoi ne pouvait elle pas s’expliquer, vraiment, dire ce qui l’a fait démarrer ainsi au quart de tour ?  Elle s’en veut, elle en veut au monde entier, à celui qui a gâché sa vie en tuant leurs parents sans même connaître son identité. A lui, à cause de qui elle se retrouvait dans cet état aujourd’hui. Elle en veut à ses parents un peu, aussi, de n’avoir pas réussis à se défendre correctement. S'ils n’étaient pas mort, rien de toute ça n’arriverait aujourd’hui. Mais cette pensée là la dégoûte un peu plus.

« Je, je… ! Oui, je te promets d’être prudente !»

Et finalement, c’est Valentine qui semble se calmer la première, c’est suffisant à l’ainée pour se détendre légèrement, en sentant les doigts de la rousse sur son épaule, l’innocence et l’attitude un poil enfantine qui semble revenir doucement chez elle. Camille la regarde dans les yeux, quelque peu troublée.

« Mais s’il te plait, ne fais plus de scène comme tout à l’heure, et laisse-moi parler à qui je le souhaites en restant prudente… tu me le promets en retour ? »

La blonde pose une main sur la tête de son interlocutrice pendant que celle-ci parle, mal à l’aise sur cette demande qui pour elle était compliqué à accepter. Cependant, elle sait qu’elle le doit, pour ne pas plus lâcher sa soeur encore. Et, peut être que la façon dont Valentine réussissait à rendre l’atmosphère plus douce avec son attitude d’enfant parvenu à dissuader la grande soeur de s’opposer, la faisant lâcher un rapide rire au passage.

« D’accord, je te le promets : Je ne recommencerais plus. »

En y pensant, elle ne peut s'empêcher de craindre que Cyriaque ait assisté à la scène ou qu’il en aura vent plus tard. Et l’angoisse, bien vite, remonte, quand bien même elle le masque le plus efficacement possible : C’est horrible, cette façon dont celui capable de lui donner le plus d’argent ici est celui qui lui fait le plus peur. Elle tente d’effacer cette pensée, souriant à Valentine avant de la blottir contre elle quelques secondes, pour finalement reculer.

« Et si on rentrait ? Tu as fini ton show, non ? On a qu’à rentrer, se poser devant une série… Ou bien se faire une virée nocturne en ville, qu’est ce que tu préfères ? J’ai juste envie de m’éloigner du cabaret, ce soir. »

Alors, Camille opte pour la fuite. Que juste pour ce soir, elle puisse se sentir "libre".

Camille retrouve un calme difficile, grace à sa soeur et sa bonne humeur qui revient et parvient à la faire sourire, malgré l’amertume qu’elle peut bien ressentir.

« Je récupère mes affaires et on va à la pizzeria, puis dans le bar dansant de la dernière fois, je veux qu’on danse toute les deux ! Attends-moi dehors ! »

Camille s'exécute, s’éloigne cependant juste un peu de l’entrée en essayant de passer inaperçues pour les personnes qui auraient l’envie de venir. Elle guette, jusqu’à voir Valentine revenir, et c’est le soulagement qu’elle ressent quand elle la pousse à avancer rapidement en lui tirant le bras.

« Je vais prendre une savoyarde ! Oh enfaite c’est dommage que t’es pas vu tout mon spectacle, j’ai enfin intégré mon nouveau numéro, les gens étaient ravis ! Tu ét… »

Heureusement Valentine s’arreta en pleine phrase, laissant deviner par ces deux mots à peine l’interrogation qu’elle aurait pu formuler. Elle préfère faire comme si elle n’a rien entendu, pour réagir à la phrase précédente.

« Désolé, j’aurais aimé voir ça pourtant !  »

Après ça, le sujet change au plus grand soulagement de la blonde, pour parler de tout et de rien pendant votre avancé à la pizzeria et une fois les pizzas commandé. L’atmosphère est calme, tout ce qu’il faut à Camille pour se sentir bien.

« Tu es amoureuse, Camille ? »

La question lui semble brutale, la laisse quelque seconde perplexe et sans réaction. Mais elle fini par sourire, plus tristement qu’elle ne l’aurait espéré ceci dit. Si elle savait Valentine, l’un de ses autres secrets qui l’a blesse et l’écoeure encore, comme tout le reste.

« Oui. Je le suis… Mais, pour le moment je n’ai pas envie d’en parler. C’est assez compliqué, disons. »

Elle rit doucement, sert un coup Valentine du pichet d’eau qu’elles ont demandé avant de se servir et de boire un coup.

« Et toi ? Est ce qu’il y a… Quelqu’un ? »

Ca semble étrange, comme question. Parce qu’elle ne l’a jamais posé auparavant, lui semble t-il. Et qu’elle flippe de la réponse.

« Oh, d’accord. J’espères que ça s’arrangera, et que tu me présenteras le garçon ! »

Camille ne prononce aucun mots, feintant d’être incapable de parler le temps de boire. Elle ne se sentait pas capable de mentir sur le sujet, ou encore devoir s’expliquer sur ce qu’elle cache véritablement. Mais ça la questionne, l’inquiète aussi également, sur si sa soeur elle a été capable d’aimer. Oh, Camille la si bien couvée et surveillée qu’elle pense que si c’était le cas, elle l’aurait vu.

« Oh non je n’ai d’amoureux. Enfaite euuuh… »

Et ça la rassure de voir qu’elle a juste, de constater qu’elle n’a rien manqué à la vie de sa cadette, sinon quoi elle aurait sûrement envisagé de pousser plus loin sa protection si il le faut, pour éviter qu’elle soit entraîné dans des histoires. Elle remarque finalement l’hésitation ou la gêne ? De Valentine, la regarde dans les yeux en attendant la suite.

« Ca fait quoi, d’être amoureuse ? J’aimerais bien connaitre cette sensation.
… Huuum »

Elle lâche, sans réfléchir, comme réaction à sa méditation soudaine. C’est qu’il faut trouver les mots, les bons, qui ferait rêver Valentine. Ne pas lui dire, que l’amour ça peut être tragique, douloureux.

« Et bien, ça donne le sourire quand tu penses à l’autre… Tu sens ton coeur battre, et c’est bizarre. Bizarre, mais plaisant. »

Elle sourit pour appuyer ses mots, qu’elle ne pense pas du tout. Mais peu importe, Camille a toujours été capable des pires mensonges si il le faut pour garder l'innocence de sa soeur intacte.

« Je pense que… Tu comprendras mieux tout ça, le jour où ça t’arrivera. »

Sauf que Camille espère que ça n’arrive pas, justement.